Toutes les villes en ont, de ces bâtiments aussi vieux que désastreux en rendement énergétique. Ils sont un aspect parfois désuet. L’intérieur est encore pire: compliqué à agencer de manière moderne, énergivore et souvent coûteux. Certains projets immobiliers tentent de ne pas tomber dans ce piège.

Les premiers bâtiments genevois respectant le label «One Planet Living» vont voir le jour en 2023. Il s’agit du «Green Village» prévu au Grand-Saconnex. Au programme: un immeuble d’habitations, un hôtel mais aussi des bureaux. L’un des porteurs du projet, François Guisan, raconte: «Le but est de créer un mode de vie.» L’intégrateur Développement Durable chez Implenia précise que le label a été développé avec le WWF. «C’était un travail de longue haleine.»

Autre projet – genevois lui aussi – celui porté par Magid Khoury, de chez Capvest. Il cherche à créer un campus de l’innovation à Genève, sur un terrain actuellement destiné à l’agriculture. Son objectif: déclassifier la parcelle afin de pouvoir y construire son projet. Suite à un référendum, une votation populaire cantonale est prévu le 24 novembre pour se prononcer sur ce déclassement.

En quelques mots, sur une parcelle totalisant 170’000m2, Magid Khoury cherche à construire des bâtiments sur 12’000 m2 d’emprise au sol, le reste serait occupé notamment par cinq terrains de football, des parcs, collines arborées, potagers urbains, parcours vita ou autres.

A l’intérieur, il veut de l’innovation au service du développement durable. «Il y a un écosystème à construire. Il faut des commerces à disposition, de la restauration, des amphithéâtres, des salles pour la culture, le sport. Les gens doivent s’y sentir stimulés», insiste le porteur de projet.

Gros projet – gros budget?

Autant le projet du Grand-Saconnex que celui de Pré-du-Stand représentent des millions de francs. Magid Khoury confie avoir déjà injecté quelques millions dans le plan d’études. Pour le groupe d’étude qui s’est penché sur le quartier labellisé, François Guisan parle de «beaucoup de travail en amont, ce qui permet ensuite d’optimiser – voire de faciliter – la mise en oeuvre.»

Le moteur de ce projet d’Implenia évoque une nouvelle manière de concevoir l’immobilier. Plus que de simples bâtiment, il s’agit d’un tout. Le «Green Village» est né de l’alliance entre le Conseil œcuménique des Eglises (COE) et de One Planet Living, une Association Suisse pour des quartiers durables. La commune du Grand-Saconnex et Implenia ont également beaucoup oeuvré. La ville a le label «Cité énergie» tandis qu’Implenia est le développeur du projet.

Bétonner, encore?

Un des arguments redondants à l’encontre de ces projets est celui des surfaces déjà construites mais inutilisées. L’Office fédéral de la statistique (OFS) note dans un panorama du développement durable que la préservation des ressources naturelles ainsi que la limitation d’usage de ressources non-renouvelables sont nécessaires.

Un argument que Magid Khoury conteste. Il souligne les efforts menés pour réduire la consommation énergétique des constructions. Pour lui, la plupart des bâtiments actuellement vacants ne répondent pas aux besoins des entreprises: «Ils sont souvent énergivores, mal localisés, ils offrent peu de possibilités et de flexibilité en termes d’aménagement».

Le label Minergie créé en 1998 a contribué à rendre le parc immobilier plus efficient en matière d’énergie. Le canton du Valais estime que les divers efforts réalisés depuis les années 80 ont porté leurs fruits. Il affirme: «Grâce à ces exigences, progressivement renforcées, les bâtiments construits actuellement consomment 4 à 5 fois moins d’énergie pour le chauffage et la production d’eau chaude (par rapport aux bâtiments des années 70) ce qui rend le recours aux énergies renouvelables (chaleur de l’environnement, solaire, bois) intéressant.»

La construction éco-responsable est donc une tendance qui se poursuit depuis quelques années déjà. La prise de conscience écologique a peut-être accéléré les choses, mais a aussi amené son lot de personnes désireuses de surfer sur ce succès. «Je ne suis pas un opportuniste», affirme Magid Khoury. S’il voit avec envie ce qui se fait à Lausanne, Zurich ou encore dans certains pôles d’innovation étrangers, c’est qu’il estime que Genève peut bien proposer sa propre solution. Il ajoute: «Il faut arrêter de se dire que l’on ne peut pas le faire. On a ce qu’il faut pour développer le campus de l’excellence.»